
Le maillot vert du Tour de France est désigné à tort ou à raison comme le maillot du meilleur sprinteur. Il n’y qu’à voir le nom des coureurs ayant inscrit leur nom au palmarès dudit classement durant les deux dernières décennies et même au siècle dernier pour s’en convaincre : Zabel, McEwen, Hushovd, Boonen, Freire, Petacchi, Cavendish. Il est vrai que le système de points dégressif en fonction de la complexité des étapes n’est pas étranger à la favorisation des hommes les plus rapides du peloton au sein du classement qui a pour but de récompenser le coureur le plus régulier sur les premières places de chaque étape.
L’article 24 b du règlement de la 107e édition dispose que « le classement général individuel par points s’obtient par l’addition des points enregistrés dans les classements individuels de chaque étape, selon les barèmes suivants, et compte tenu des pénalités en points :
- pour les étapes en ligne dites sans difficulté particulière (art. 22-coeff. 1 et 2) : 50-30-20-18-1614-12-10-8-7-6-5-4-3-2 points pour les 15 premiers coureurs classés ;
- pour les étapes en ligne dites de parcours accidenté (art. 22-coeff. 3) : 30-25-22-19-17-15-13-11-9-7-6-5-4-3-2 points aux 15 premiers coureurs classés ;
- pour les étapes en ligne dites de grandes difficultés (art. 22-coeff. 4 et 5) : 20-17-15-13-11-10-9-8-7-6-5-4-3-2-1 points aux 15 premiers coureurs classés ;
- pour l’étape en contre-la-montre individuel (art.22-coeff. 6) : 20-17-15-13-11-10-9-8-7-6-5-4-3-2-1 points aux 15 premiers coureurs classés ;
- pour chaque sprint intermédiaire, 20-17-15-13-11-10- 9-8-7-6-5-4-3-2-1 points aux 15 premiers coureurs classés.
Depuis 2012, Peter Sagan y assoit un règne quasi sans partage. Hormis, en 2017, où Matthews ravie le classement au gré de la disqualification du premier et des abandons successifs.
Un élément vient de plus en plus s’immiscer dans la lutte au maillot vert. Le jeu des sprints intermédiaires a de plus en plus une place prépondérante dans la course au maillot vert. A l’instar d’un Sagan qui domine nettement les purs sprinteurs en les chassant au cours des étapes de montagne.

Dans la lutte du maillot vert, plusieurs candidats semblent se détacher : Sagan, WVA, Bennett, Ewan, Colbrelli, Coquard, Nizzolo, Trentin.
Hiérarchiquement, les deux premiers sont les plus gros clients de par leurs aptitudes à figurer tant sur les arrivées de puncheurs que de sprinteurs purs et de par leur forme pré-Tour depuis la reprise post-confinement.
Pourquoi éliminer Bennett des prétendants ?
La réponse est simple, l’irlandais de la DQS est un homme certes passe partout mais restera l’atout sur les étapes plates. Les étapes destinées aux puncheurs, bien que celui-ci puissent y prétendre, sont destinés plutôt à un Julian Alaphilippe à l’instar de l’étape 2. Stybar ou même Asgreen peuvent même avoir une option en tant que breaker ou late attacker. Dès lors de points précieux dans la lutte au maillot vert semble être amputés au sprinteur polyvalent de la Deceuninck Quick Step. Ajoutons que sa forme ou du moins son incontestabilité sur des étapes qui semblent lui correspondre au cours des dernières semaines n’est pas un gage de garantie. Il apparaît comme un homme à éliminer d’emblée.
Pourquoi éliminer Ewan des prétendants les plus dangereux ?
Caleb Ewan est tout comme Bennett une option nette de victoires sur les arrivées plates au vue de la faiblesse du plateau de purs sprinteurs. L’an passé, Ewan c’est sept podium sur les sept étapes destinées aux purs sprinteurs dont trois victoires. Cette année, l’aussie a prouvé qu’il était encore une fois le sprinteur pur le plus régulier du monde. Signant quatre victoires pour sept podiums. N’échappant que par deux fois à un podium sur les étapes promises à un sprint massif. Seulement, le sprinteur de la Lotto Soudal a fait preuve d’une pointe de déception sur Milan San Remo et sur les deux dernières étapes du Tour de Wallonie qui pourtant lui correspondaient mieux qu’à Arnaud Demare. Ce qui semble l’éliminer des prétendants sur les arrivées punchy. D’autant que l’effectif du Tour n’est nullement tourné vers le général, ce qui ouvre des portes pour ses coéquipiers et le prive de points précieux. La Soudal étant tourné vers la chasse d’étapes et non la chasse aux divers classements.
Pourquoi éliminer les sprinteurs les plus polyvalents ?
Coquard, Nizzolo ou Trentin ont pour point commun de grimper plus ou moins bien, d’être présents sur les sprints montants. Le dernier a pour handicap d’avoir dans son équipe GVA qui sera la carte puncheur. Ce qui lui ôte des points précieux sur les étapes 2, 5 et autres. La CCC est tournée vers les victoires d’étape (avec un espoir de Général pour Zakarin cependant sans aucune garantie de forme). L’objectif est le même pour la NTT du récent champion d’Italiens qui souffrira de la concurrence sur certaines étapes avec le norvégien Edvald Boassen Hagen. Quant à Coquard, il est sûrement la meilleure option des trois affichant un modeste 58kg sur la balance. Lui permettant de bien passer les bosses. D’autant qu’au vue du tracé du Tour, le dauphin de Demare a fait un travail spécifique en vue des étapes plus punchy. Cependant, si son objectif principal reste de remporter enfin une étape sur le Tour de France après trois années sans disputer de Grand Tour, ce qui devrait le conduire à une certaine régularité. Cela peut s’avérer un handicap dans la mesure où la chasse aux points pourrait contrarier ses plans dans sa quête de succès. Ses trois années sans trois semaines de courses d’affilée lui seront-elles préjudiciables ? B&B Vital Concept a aussi pour but de décrocher un succès sur le Tour. Des échecs successifs n’ouvraient-ils pas la porte à un Barthe tout aussi en forme et brillant de polyvalence ? La question demeure en suspens tant Barthe a montré de belles capacités sur la Vuelta l’an passé.

Peter Sagan, en atteste par ses sept maillots verts, est le coureur le plus régulier sur le Tour de France au cours de la dernière décennie. Pas moins de 135 étapes disputées pour 56.3% de Top 10 (76 fois), 47,4% de Top 5 (64 fois), un tiers de Top 3 (45 fois) et 8.9% de victoires (12 fois). Ce n’est donc pas une surprise qu’il soit le recordman incontesté devant Zabel au classement par points. Un huitième sacre prolongerait encore plus son hégémonie pour les décennies à venir. De plus, même si la Bora a toujours œuvré tant pour Sagan que pour son leader au Général. Avec un Buchmann qui pourrait délaisser le GC si les séquelles de sa chute au Dauphiné sont toujours présentes, cela offre des occasions nettes de travail supplémentaire pour le maillot vert. Avec 25000€ pour le vainqueur final, 300€ de rentes quotidienne au porteur du maillot et 1500€ pour le vainqueur de sprint intermédiaire, en période de coupe budgétaire avec une baisse des contrats de sponsoring et d’une diminution des courses (et donc des prix qui leur sont attribués), la piste Sagan est un gage de sûreté financière sur ce Tour.
Wout Van Aert est sûrement à raison considéré comme le candidat idéal pour détrôner le Roi. Vainqueur des Strade Bianche, de Milan San Remo et de la première étape du Dauphiné, le belge de la Jumbo-Visma est assurément l’homme à battre en cette saison. Disposant d’une pointe de vitesse redoutable en démontre sa victoire à Albi l’an dernier devant Viviani et Ewan, le multichampion du monde de cyclo-cross est un danger en cas de sprint massif mais encore plus dans les arrivées pour puncheurs ayant montré de grandes aptitudes dans les efforts en montée que ce soit dans la cote de la Gachet, dans le Toffe ou dans le Poggio. Des aptitudes que l’on pouvait déceler déjà à Voiron.
En terme de matchup, les rapports semblent s’être inversés. Si Sagan était mieux placé lors d’une arrivée groupé quatre fois sur les six fois où ils se sont rencontrés. Le sprint de Milan-Turin a montré que Sagan est toujours au top mondial mais que WVA a une pointe de vitesse supérieure. Reste que si les sprints intermédiaires sont à maintes occasions placés à moins d’une heure de course menée tambours battants, la Jumbo-Visma aura-t-elle intérêt à les chasser et donc chasser plusieurs lièvres ? Roglic et Dumoulin faisant office de favoris de ce Tour 2020. Reste que dans ces conditions, WVA devrait être mis au service de l’équipe. Et ainsi mettre de côté ses ambitions personnelles dans la quête du maillot vert. Qui comme il le dit si bien « représente un travail au quotidien ». Et donc énormément d’énergies dépensées au détriment d’une équipe qui cherche à détroner les Ineos.
Sur les 400 points distribués au sprint intermédiaire, Sagan peut prétendre statistiquement à 120/140 points « facilement » en prenant les échappées sur les étapes dont les arrivées ne lui sont pas propices. Mais c’est théoriquement un maximum de 240 points qui s’offrent à lui, si le peloton en décide.
Les purs sprinteurs auront au maximum et difficilement 400 points à prendre. Là où les sprinteurs polyvalents, c’est-à-dire pouvant bien figuré sur les arrivées de puncheurs auront des ouvertures comme lors des menant à Lyon ou Champagnole pour faire sauter les sprinteurs les plus purs mais aussi ajouter 110 points de plus à leur besace.
Or, nous avons vu que Sagan figure pour une bonne part entre la 2e et la 5e place lors des arrivées tant massives que pour puncheurs. Cela implique qu’il peut prétendre en confondant sprints massifs et arrivées de puncheurs entre 345 et 195 points. Auxquels s’ajouteraient les points des sprints intermédiaires.
Toutes les conditions sont réunies pour dire : LONGUE VIE AU ROI.
PRONOSTIC

Peter Sagan vainqueur du classement par points : 1.7 – 2.5% (PasinoBet)
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